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Nazis und der Nahe Osten
Wie der islamische Antisemitismus entstand
Realtè EU, 26 décembre 2011
« La Grande Bretagne est isolée ! » Voilà comment de nombreux gros titres de commentateurs allemands ont résumé le résultat du dernier sommet de l’Union Européenne (UE). L’hebdomadaire allemand « Die Zeit » a même vu la « force » avec laquelle la Grande Bretagne « a été repoussée de l’Europe continentale » comme un signe de « renaissance » pour l’Europe et de « division …. de l’Occident. [1]
Je ne vais pas le pencher ici sur le débat sur l’union fiscale, mais plutôt sur une autre « division de l’Occident » et sur un danger que même les politiques fiscales les plus robustes ne pourront pas éliminer : le risque d’une bombe iranienne ou d’une bombe sur l’Iran.
Là-dessus Berlin et Londres sont également diamétralement opposés, bien que dans une différente constellation : alors que la politique iranienne de Londres peut compter sur l’approbation des Etats-Unis et d’acteurs importants de l’UE, l’approche de Berlin envers l’Iran est plus isolée qu’il n’y paraît en surface. La discussion sur la banque centrale iranienne le démontre bien.
Lutte au sujet de la Banque Centrale Iranienne (BCI)
Aujourd’hui, les sanctions sur la banque centrale iranienne sont perçues comme l’instrument-clé pour éviter la guerre tout en mettant un terme aux ambitions nucléaires du régime. Par conséquent, le Congrès américain a entériné le « Iran Threat Reduction Act (loi sur la réduction de la menace iranienne), qui interdit aux banques étrangères d’opérer aux Etats-Unis si elles mènent des transactions avec la BCI. « Cela peut causer des difficultés à court terme pour le marché mondial du pétrole, et cela peut irriter certains de nos alliés » a expliqué Howard Berman, membre du Congrès, « mais c’est nécessaire, car mettre un terme au programme nucléaire iranien est d’une importance stratégique capitale et nous allons manquer de temps. » [2]. Le souci de Berman concernant « certains de nos alliés » fait particulièrement référence à Berlin.
Alors que la Grande Bretagne a rompu toute connexion avec la BCI et que des appels similaires ont été lancés par la France et d’autres pour geler les comptes de la BCI en Europe, Berlin a choisi une différente approche. « Le gouvernement fédéral ne soutient pas cette demande. » [3] Pourquoi ?
Parce que « l’Allemagne, avant la France et l’Italie, est de loin le pays ayant le plus gros volume d’affaires traitées avec l’Iran » a expliqué le Frankfurter Allgemeine Zeitung. « En cas de sanctions beaucoup plus sévères, ces affaires pourraient être menacées. » Il y a « des voix puissantes au sein du gouvernement fédéral qui ne veulent pas mettre en péril les affaires germano-iraniennes tant que celles-ci pourraient être reprises par des sociétés d’autres régions comme la Russie ou l’Asie. »[4]
Bien sûr, Berlin veut également empêcher l’Iran de fabriquer des armes nucléaires. Mais les affaires sont prioritaires. Selon le Spiegel, le ministre allemand de l’Economie et de la Technologie Philipp Rösler est « fondamentalement d’accord avec l’usage d’un boycott plus sévère pour répondre à la menace nucléaire iranienne, tant que « les contrats existants qui ont été autorisés dans le passé ne sont pas trop affectés », comme l’ont annoncé les fonctionnaires de son ministère. » [5]
Ceci est un argument absurde. Cependant l’Allemagne détient la clé technologique qui pourrait paralyser l’économie de l’Iran : deux tiers des sociétés industrielles iraniennes et trois quarts des petites et moyennes entreprises utilisent des machines et équipements d’origine allemande. C’est pourquoi « les Iraniens dépendent entièrement des pièces détachées et fournisseurs allemands » a affirmé Michael Tockuss, l’ancien président de la Chambre du Commerce et de l’Industrie germano-iranienne à Téhéran. [6] Donc, le concept de sanctions occidentales est menacé par les priorités de Philipp Rösler.
L’Allemagne au cœur des discussions
A la fin d’Octobre 2011, David Cohen, le sous secrétaire du département du Trésor américain, responsable des sanctions contre l’Iran s’est rendu à Berlin et dans d’autres capitales européennes pour convaincre les Européens de la nécessité de sanctions contre la BCI.[7] Lorsque les ministres des affaires étrangères de l’UE ont discuté du dossier iranien le 14 novembre, l’Allemagne, « en tant que principal exportateur européen vers l’Iran, et en tant que pays ayant la plus lourde responsabilité historique envers Israël, [était] au cœur de ces débats. » [8] Il n’y eut cependant aucun résultat de cette rencontre et celle-ci fut ajournée au 1er décembre 2011.
Entre-temps, la pression s’est intensifiée sur les pays hésitants : l’Allemagne, de même que l’Italie, la Finlande et la Suède. Le 21 novembre, le président américain a qualifié la BCI de « problème de blanchiment d’argent » et a lancé un avertissement contre toute coopération avec cette dernière. Le jour même, le Canada et la Grande Bretagne ont unilatéralement rompu leurs liens avec la BCI alors que le président français Nicolas Sarkozy a non seulement lancé un appel au boycott de la BCI, mais aussi à l’arrêt de l’importation de pétrole iranien en Europe. [9]
Le 30 novembre, un jour après l’attaque organisée contre l’ambassade britannique à Téhéran, David Cohen est retourné au bureau de la Chancelière allemande pour prôner un boycott de la banque centrale. « Le message de ce visiteur était clair à Berlin : ce n’est qu’après avoir épuisé toutes les possibilités en termes de sanctions que l’option militaire pourra être exclue. »[10] Le 1er décembre, les ministres des affaires étrangères de l’UE ont continué leurs débats sur l’Iran. Quels ont été les résultats ?
Ménagements après l’attaque de l’ambassade
Le gouvernement fédéral allemand est resté déterminé et a continué à rejeter les sanctions contre la BCI. Il s’est cependant joint à l’appel à un embargo européen sur les importations de pétrole, une mesure qui a bien moins d’impact sur les intérêts économiques de l’Allemagne. Les trois premiers trimestres de 2010, seulement 1.8 % des importations de pétrole en Allemagne provenaient d’Iran. En 2011, ce chiffre a continué à baisser jusqu’à 0.86 %. [11]
Néanmoins, la deuxième réunion des ministres des Affaires Etrangères européens n’a pas réussi non plus à accroître la pression sur l’Iran. La banque centrale iranienne n’est même pas mentionnée dans la déclaration finale et la décision d’embargo sur le pétrole a été remise à plus tard puisque les conditions économiques difficiles dans des pays comme la Grèce et l’Espagne excluent prétendument une telle mesure. Maintenant des « experts techniques » sont en train de traiter cette recommandation et le débat a été ajourné jusqu’à la fin janvier, selon Catherine Ashton, chef de la politique étrangère de l’UE. [12]
Résultat vraiment monumental ! Il n’est pas étonnant de voir que même Bloomberg.com, un service d’information spécialisé en économie, a tourné cette réunion en dérision : « Qui aurait pu penser qu’une semaine qui a vu des manifestants saccager l’ambassade britannique à Téhéran se termine avec une Europe qui manque de résolution envers le régime iranien ? » [13]
Néanmoins, les ministres des Affaires Etrangères ont condamné l’assaut de l’ambassade britannique à Téhéran et ont promis de répondre avec des mesures appropriées. [14] Mais le même jour, le ministre des Affaires Etrangères allemand M. Westerwelle a annoncé qu’il avait l’intention de recevoir le ministre des Affaires Etrangères iranien Ali Akbar Salehi pour des négociations bilatérales. [15] Les deux ministres se sont rencontrés à Bonn le 4 décembre 2011.
Les négociations Westerwelle-Salehi
Alors que Londres a réagi à l’attaque de l’ambassade par le renvoi de 25 personnes qui travaillaient à l’ambassade d’Iran à Londres, l’ambassadeur iranien à Berlin a exprimé sa satisfaction au sujet des relations de son pays avec l’Allemagne : « Nos ministres se sont parlé au téléphone. Il se peut que notre ministre des Affaires Etrangères vienne à Bonn pour la conférence sur l’Afghanistan. Et M. Westerwelle a sollicité une réunion entre les deux ministres. » [16]
Pourtant, l’UE a interdit précisément à Ali Akbar, l’actuel ministre des affaires étrangères, l’accès à l’UE parce que, en tant qu’ancien directeur de l’Organisation de l’Energie Atomique Iranienne, il a joué un rôle essentiel dans le développement des armes nucléaires. [17] Au début 2011, le président iranien Ahmadinejad l’a nommé ministre des Affaires Etrangères. C’est pour cette raison que l’UE a levé l’interdiction de voyager de Salehi en mai 2011. Téhéran a appris comment une personne sous l’emprise de sanctions pouvait se libérer de celles-ci : il suffit de promouvoir la personne à un rôle de ministre. [18]
Une rencontre avec un représentant de ce régime niant l’Holocauste est déjà une raison suffisante de se plaindre. Mais aucune plainte n’a été entendue en Allemagne.
La situation a été encore davantage exacerbée par le rapport de l’AEIA du 8 novembre 2011 qui a apporté la preuve des recherches en armement nucléaire en lran. Quatre semaines plus tard, M. Westerwelle a rencontré une personne importante de ce programme d’armement nucléaire en agissant comme si ce rapport n’existait pas. L’Allemagne est le seul pays en Occident à pratiquer ce genre de dialogue. Elle fait comprendre au régime iranien qu’il a un partenaire au sein de l’UE qui cherche à contrecarrer les efforts occidentaux de pression sur le régime. Ce n’est certainement pas un moyen d’entraver le programme d’armement nucléaire iranien.
Cela a été confirmé par M. Salehi après sa rencontre avec son homologue allemand. « L’unité des Européens n’est que superficielle », a-t-il affirmé dans un entretien avec l’agence de presse allemande Mehr News . « Chaque membre poursuit ses propres intérêts …. Ils [« les Européens »] ont cette approche axée sur le profit, et avec un tel clivage, les sanctions ne peuvent pas être imposées. » [19]
La question demeure de savoir comment cette politique peut se concilier avec les déclarations pro-israéliennes de la Chancelière allemande. Y a-t-il un gouffre entre le bureau de la Chancelière allemande et le ministère des Affaires Etrangères en ce qui concerne l’Iran ? [20] Probablement pas tant que ça. Il n’y a jamais eu de ministre des Affaires Etrangères aussi affaibli et un Chancelier aussi fort concernant la politique étrangère. Nous devons donc soupçonner Angela Merkel d’être d’accord avec la politique iranienne de l’Allemagne. Après tout, le rejet d’action unilatérale contre l’Iran peut lui être attribué.
Coalition des Détracteurs
Si le gouvernement fédéral allemand était vraiment concentré sur un « resserrement rapide et robuste » des sanctions, l’Allemagne aurait depuis longtemps rejoint la coalition menée par la France et la grande Bretagne depuis 2007. Berlin l’a rejeté à plusieurs reprises. Une exception s’est produite le 26 janvier 2010. Ce jour là, et en compagnie du président israélien Simon Peres, la Chancelière a déclaré que l’Allemagne est « préparée, avec un groupe d’Etats volontaires, à imposer des interdictions plus strictes sur le commerce avec l’Iran. »[21]
Un embargo sur le commerce par un « groupe d’Etats volontaires», par exemple l’Allemagne et l’Italie, pourrait être vraiment efficace. D’après des statistiques du Bureau Allemand du Commerce Extérieur en septembre 2007, les sociétés allemandes sont leaders sur le marché dans sept des neuf secteurs d’ingénierie en Iran. L’Italie est en tête de liste dans les deux catégories finales. [22] Une partie essentielle de l’économie iranienne repose entre les mains des Allemands et des Italiens sans la capacité des Chinois ou des Russes à intervenir avec des pièces détachées à la dernière minute.
Si la France rejoignait ce « groupe d’Etats volontaires », la pression sur Téhéran serait encore plus immense. Après tout, dans les huit premiers mois de 2011, 64% de toutes les exportations européennes vers l’Iran provenaient de ces trois pays. (Valeur totale : 6.7 milliards d’euros). L’Allemagne est en tête de liste avec un volume d’exportations équivalent à un montant de 2 milliards d’euros, suivie par l’Italie (1.2 milliards d’euros) et la France (1.1 milliard). [23]
Mais en février 2010, la Chancelière allemande a refusé toute « coalition d’Etats volontaires» et a déclaré : « En tant qu’Européens, nous voulons prendre toutes les mesures ensemble. » [24] Ceci, néanmoins, correspond davantage à une « coalition des détracteurs ». Prendre toutes les mesures ensemble revient à laisser la vitesse et la portée des sanctions au pays les moins enclins à prendre des sanctions.
C’est là que réside le caractère exemplaire de la nouvelle politique iranienne de la Grande-Bretagne : elle a renforcé la variante de politique unilatérale avec son boycott unilatéral et décisif de la BCI. Elle l’a fait passer au lieu d’attendre un consensus des 27 Etats membres de l’UE et a également montré quels moyens sont disponibles pour l’Allemagne si elle voulait vraiment empêcher l’Iran d’obtenir la bombe ou d’éviter une bombe sur l’Iran.
En ce moment, les gros titres des médias européens sont dominés par les déficits budgétaires d’Etats membres de l’UE. Berlin prévaudra peut-être avec son concept d’ « union fiscale ». Il me paraît pourtant assez improbable que l’Europe, sous la direction de l’Allemagne, accepte la bombe nucléaire iranienne. La décision sur la direction à prendre par l’UE reste ouverte. Elle a juste été repoussée jusqu’à la fin janvier.
[1]Bernd Ulrich, Stärker, besser mehr, in DIE ZEIT, December 15, 2011.
[2] Iran sanctions bill worth the risk of market disruption, auf: http://thehill.com/blogs/floor-action/house/199241-dem-lawmaker-iran-sanctions-bill-worth-the-risk-of-oil-market-disruption, December 13, 2011.
[3] Daniel Brössler, Sanktionen gegen Iran wegen Atomprogramm – Westerwelle pocht auf Öl-Embargo-Politik, in: Süddeutsche Zeitung (SZ), November 28, 2011.
[4] Berlin für ‘deutliche Verschärfung’ der Iran-Sanktionen, in: FAZ, November 23, 2011.
[5] Boykott gegen die Bombe, in: Der Spiegel 46/2011, November 14, 2011, p. 86. Emphasis added by author.
[6] Interview with Michael Tockuss, Focus Online, February 12, 2006; see also: Matthias Küntzel, “Berlin, The Ayatollahs, And The Bomb”, in: The Journal of International Security Affairs, Number 18, Spring 2010, pp. 39-46.
[7] Matthias Rüb, Amerika dringt auf Iran-Sanktionen, in: FAZ, 26.10.2011.
[8] Berlin Considers Stronger Sanctions: US and Israel Demand Greater Measures against Tehran, on: Spiegel-Online, November 16, 2011.
[9] France urges freeze on Iranian oil purchases, central bank assets, on: httw://www.theglobeandmail.com, November 21, 2011.
[10] Dieter Bednarz, Quellen austrocknen, in: Spiegel 49/2011, p. 112.
[11] Bundesamt für Wirtschafts- und Ausfuhrkontrolle, Rohölimporte September 2011, auf: http://www.bafa.de.
[12] L’UE renfoce les sanctions sur l’Iran et envisage une interdiction du pétrole, sur www.reuters.com, December 1, 2011. Le passage correspondant tiré de la décision du Ministre des Affaires Etrangères et formulé comme suit: “ le Conseil a accepté d’élargir des sanctions existantes, en examinant, en coordination étroite avec des partenaires internationaux, des mesures supplémentaires incluant des mesures visant à affecter durement le système financier iranien, dans les secteurs du transport, de l’énergie, des mesures contre les Gardiens de la Révolution Iranienne, de meme que dans d’autres domaines. Le Conseil a chargé des organismes du Conseil préparatoire d’élaborer davantage ces mesures pour les adapter, au plus tard pour le prochain Conseil des Affaires Etrangères ». 3130th Foreign Affairs Council meeting, Brussels December 1, 2011, Council conclusions on Iran
[13] EU Wimps Out on Oil Sanctions to Halt Iran’s Nuclear Drive, on: http://bloomberg.com , December 1, 2011.
[14] 3130th Foreign Affairs Council meeting, Brussels December 1, 2011, Council conclusions on Iran.
[15] Sebastian Fischer, Washington fürchtet Alleingang Israels, in: Spiegel-Online, December 1, 2011.
[16] “Wir sind an Sanktionen gewöhnt”. Interview with Iran’s Ambassador in: Spiegel-Online, December 1, 2011.
[17] Council Decision of 26 July 2010, in: Official Journal of the European Union, 27 July 2010, L 195/61.
[18] Iran Sanctions E-Z Pass. Tehran officials exploit a loophole to travel the world, in: Wall Street Journal, August 11, 2011.
[19] Parisa Hafezi and Ramin Mostafavi, Iran says EU will not impose oil sanctions, December 11, 2011, in http://uk.reuters.com.
[20] This impression could have arisen in May 2011, since Angela Merkel was the one who enabled sanctioning of the European-Iranian Trade Bank in Hamburg, thereby stopping the Foreign Office, which had sought to expand the bank’s areas of activity. cf. Matthias Küntzel, Berlin lässt iranische Bank fallen, May 15, 2011, at: http://www.matthiaskuentzel.de/contents/berlin-laesst-iranische-bank-in-hamburg-fallen.
[21] Merkel und Peres einig über Iran-Politik, in: FAZ, January 27, 2010
[22] Bundesagentur für Außenwirtschaft und Verband Deutscher Maschinen- und Anlagenbau e. V., Wachstumsmärkte im Nahen und Mittleren Osten, Cologne 2007, p. 10, 35, 73, 86, 119, 151, 163, 187 and 226.
[23] Eurostat, November 25, 2011.
[24] Interview with Angela Merkel, in: FAZ, Februar 25, 2010.